Aïda Bruyère, jeune artiste française ayant grandi au Mali, fonde sa pratique sur l’image. Issues de différentes sources, transformées puis démultipliées et présentées à l’échelle d’un mur ou d’un livre, les images sont jusqu’à présent l’outil de prédilection de l’artiste pour aborder les enjeux liés au corps et à ses constructions dans l’espace social. Depuis sa première série de photographies, une fiction imaginée à partir de la vie excentrique d’un malien fortuné, jusqu’à ses recherches récentes sur le twerk et les battles de dancehall, une danse d’origine africaine apparue en Jamaïque à la fin des années 1970, elle explore les mécanismes de la constitution et de l’expression des identités à travers les contre-cultures urbaines. Les postures, les accessoires, les lieux de fêtes et de compétitions fascinent l’artiste depuis son adolescence, notamment pour leur puissance émancipatrice. Évoluant en marge de la culture dominante, ces gestes et ces représentations se construisent avec et en réaction à des images préconçues, colonisées, sexualisées et politiques du corps.
Aïda Bruyère poursuit ces recherches au Palais de Tokyo avec une installation inspirée d’une boîte de nuit de Bamako. Mais de cet espace social qui s’organise autour de l’énergie des corps rapprochés, de la musique et de l’ivresse, il ne reste que quelques images et objets. C’est d’abord la crise économique au Mali qui a conduit l’artiste à s’intéresser, dans le cadre de cette exposition, à l’abandon des lieux de sociabilité nocturne. Leur fermeture depuis 2020 et la distanciation physique forcée apportent aujourd’hui un autre éclairage à son projet.