Jeudi 16 décembre 2010, au Palais de Tokyo, le jury de SAM Art Projects a attribué le second Prix SAM pour l’art contemporain à Laurent Pernot.
Laurent Pernot est né en 1980, il vit et travaille à Paris.
Pays de destination du projet : Brésil
Galerie : Galerie Odile Ouizeman
Titre : « Ruée vers la perdition »
« Ce projet de film et d’installation s'inscrit dans le prolongement de mes précédents travaux : je propose d'invoquer une réflexion entre passé et présent, de partir en quête des vestiges et des stigmates qui définissent un territoire singulier, afin de produire une oeuvre qui interroge la mémoire et les rêves persistants de notre monde contemporain. Inciser dans le temps, faire le point sur le lieu d'une histoire qui a vu de nombreux espoirs se soulever, qui a bouleversé non seulement une région mais la géopolitique du monde entier. Une histoire qui a vu se heurter des fantasmes et des illusions, des miracles et des désespoirs, l'humain et l’inhumain : l'histoire de la ruée vers l'or du Nouveau Monde.
L'une des régions effervescentes de cette aventure correspond aujourd'hui à l'état du Minais Gerais, qui se trouve dans le Sud-Est du Brésil, et plus particulièrement la ville d'Ouro Preto(1) qui naquît à cette époque. Dans cet élan de colonisation à l'intérieur du Brésil, dès la fin du XVIIème siècle, une foule de pionniers et d'aventuriers en tout genre s'y installe, en provenance du continent et des confins de l'Europe. (…) Une civilisation émerge alors sur le terreau de violences et d'impensables tragédies. Depuis, le siècle des Lumières parut, des révoltes éclatèrent, nous connaissons la suite de l'histoire.
Dans le contexte d'un projet que j'intitule "Ruée vers la perdition", je m'intéresse autant aux empreintes du passé encore visibles dans la ville d'Ouro Preto et ses alentours, qu'aux objets matériels et immatériels qui constituent une mémoire et un imaginaire collectifs.(…) Dans cette perspective, mon intention s'articule autour des problématiques suivantes, dans un processus de questionnement historique et poétique : le Devenir, au sens de Deleuze(2) où l'art tient d'ailleurs une place essentielle ; la Perdition, au sens d'Edgar Morin(3) où désespérance et espérance sont (re)liées, et dont l'approche me semble urgente à notre époque.
Sur la base d'une recherche documentaire, en explorant d'une part les galeries de mines accessibles dans les profondeurs, et d'autre-part, les archives conservées par certains habitants et musées officiels(4) (en particulier des documents photographiques qui concernent l'esclavage, peu exposés au public), je souhaite d'abord produire un film à proximité et dans les entrailles même des montagnes, avec la collaboration de Terence Meunier (artiste sonore), pour concevoir par la suite une installation. Une prise de sons et d'images à l'intérieur des mines, caméra errante et mouvements mécaniques, sans autre présence que celle d'éventuels animaux sauvages, ainsi que l'élaboration d'un récit pour une voix off, constituent le dispositif de départ. »
(1) Ouro Preto signifie Or Noir, la ville a d'abord été nommée Villa Rica en 1711
(2) "Milles Plateaux", en collaboration avec Félix Guattari, éditions de Minuit, 1980
(3) "La méthode 6", Ethique, éditions du Seuil, 2004
(4) Museu Casa Dos Contos, Museu da Inconfidência, Ouro Preto
Ce projet fera l’objet d’une exposition au Palais de Tokyo en décembre 2011 et d’une publication.
Le Comité a également sélectionné le 4ème résident à la Villa Raffet. Il s'agit de l'artiste Indonésien Eko Nugroho. Il travaillera chez SAM pendant cinq mois et sera exposé au Musée d'Art Moderne de la Ville de Paris en janvier 2012.
Le Jury du Prix SAM pour l’art contemporain :
Anne-Pierre d’Albis-Ganem, directrice et commissaire du Parcours Saint Germain
Fabrice Hergott, directeur du Musée d’Art moderne de la Ville de Paris
Jean-Hubert Martin, Conservateur général du Patrimoine, commissaire d’expositions
Hervé Mikaeloff, conseiller en art contemporain et commissaire d’expositions
Sandra Mulliez, collectionneuse, initiatrice du SAM Art Projects
Hans-Ulrich Obrist, co-directeur de la Serpentine Gallery, Londres, commissaire d’expositions
Marc Pottier, conseiller en art contemporain et commissaire d’expositions
Marc-Olivier Wahler, directeur du Palais de Tokyo, site de création contemporaine, Paris